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C’est la première fois que je lis un écrivain sud-coréen, et il faut avouer qu’à part connaître ce pays comme un pays asiatique producteur de voitures concurrençant nos Peugeot, Citröen ou autres Renault, on n’en connait pas grand-chose…ni son histoire, ni sa partition. La Corée du Nord est une dictature militaire et un des derniers états communistes du monde, ce qui en fait un pays pauvre et isolé, bordé par la Corée du Sud capitaliste(les deux états ont une frontière commune de plus de 1400 Km). Les deux Corée donc sont en guerre idéologique et parfois en guerre tout court (1 million de militaires pour séparer, deux pays et un seul peuple divisé, résultante obsolète de la guerre froide des années 50/60. Bref.
Je ne vais pas faire un résumé de l’Histoire de la Corée ou des Corée…mais il faut avouer que le contexte historique et politique est particulièrement important dans ce roman.
Le vieux jardin est un roman en partie autobiographique racontant l’histoire d’un prisonnier politique qui ressort de prison après 18 années à la dure dans les geôles coréennes ; O Hyonu était un jeune étudiant opposant politique lorsqu’il s’est fait arrêter après les événements de 1980, quand la dictature militaire a réprimé sévèrement des manifestations de Gwangju, n’hésitant pas à tirer dans la foule désarmée. Ce mouvement, cette révolte sert de toile de fond puisque l’on peut suivre la vie de O Hyonu comme militant, sa clandestinité, son arrestation, sa vie en prison…Mais ce roman est aussi le théâtre d’une belle histoire d’amour entre O Hyonu et Han Yunhi, jeune artiste peintre qu’il rencontre avant son enfermement. A sa sortie de prison donc, O Hyonu cherche à retrouver sa compagne qui malheureusement est décédée. Regagnant le lieu où ils vécurent leur idylle, Monsieur O va retrouver les cahiers de Yunhi, cahiers où elle a consigné sa vie, racontant son expatriation en Allemagne, vivant la chute du mur de Berlin. Hwang Sok-yong établit d’ailleurs un parallèle entre l’histoire de l’Allemagne et des deux Corée et sur la fin du roman, une large partie est consacrée au récit des transformations de la société allemande. L’auteur, dans une histoire partiellement autobiographique, transcrit parfaitement l’idéalisme de l’époque, raconte l’espoir (et les désillusions) de la jeunesse à la recherche de ce « vieux jardin »…Voici les dernières phrases que Han Yunhi écrit à destination de son amoureux: « N’as-tu pas aperçu par hasard, ente glissant entre deux rochers, une monde plein de fleurs aux multiples couleurs dans la splendeur du soleil ? As-tu trouvé notre vieux jardin ? ».
Ce copieux livre est assez extraordinaire, Hwang Sok-yong a une très belle écriture, un bon mélange de réalisme efficace et de passages plus descriptifs laissant une impression de douceur ; j’ai aimé la présentation de la vie société asiatique (découvertes culinaires, le mode de vie coréen), l’intensité des descriptions de la vie en prison et l’amour que se porte à distance les deux personnages de l’histoire. « Le vieux jardin » est un beau livre, bien qu’assez peu gai, qui traduit les rêves de deux êtres, de deux idéalistes et en cette fin de siècle. Bravo à l’auteur et à la maison d’éditions Zulma qui fête cette année ses 20 ans d’existence.
A noter tout de même…je préviens les presbytes …550 pages avec des caractères vraiment très petits.
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J’ai globalement un peu moins aimé cet autre petit roman de Jean Echenoz, même si sa lecture est très agréable. Peut-être ai-je senti que ce roman était une esquisse, une ébauche pour les romans suivants (notamment le plus abouti « Je m’en vais » écrit 7 ans plus tard) ? .Une fois de plus, surtout à cette période pour son œuvre, l’auteur écrit un roman sans véritable histoire, et c’est plutôt le style qui captive, qui épate, qui étonne. Les phrases y sont toujours, encore, merveilleusement construites, le vocabulaire est juste, pointu, les métaphores délectables, c’est un phrasé inimitable. Par exemple…et j’aime beaucoup ce genre de petites scènes…
- « Un peu de vin fit Meyer. Merci, déclina la jeune femme en se servant un verre d’eau. Jamais bu d’aussi mauvaise eau municipale, observait-elle ensuite avec douceur, repoussant du bout de son soulier pointu, les questions dégonflées à ses pieds. »L’originalité et l’intérêt de ce roman réside dans son « étrangeté »… Lire « Nous trois », forcément, c’est l’histoire de deux plus un, là ce sont deux hommes et une femme…chacun étant épris de la même femme. Femme fortuite et froide, femme multiple, femme désirée qu’Echenoz , par un jeu de circonstances et de hasard va faire croiser dans la vie de ces hommes amoureux. L’étrangeté, le jeu, le questionnement nous poussent à lire, à vouloir savoir comment et jusqu’où l’auteur va jouer avec le lecteur et ses personnages.
On ne peut pas vraiment dire que le roman est un roman sentimental, l’histoire d’amour est plutôt reléguée au second plan. Deux moments forts de l’histoire (on ne peut pas dire les moments-clefs !), si l’on peut considérer qu’il y en a une réellement : au début du livre, tout commence avec Meyer ,le héros, qui part à Marseille pour ses vacances, mais là, un cataclysme l’y attend puisque la ville est secouée par un tremblement de terre et détruite ; et à la fin, Echenoz envoie le même Meyer dans les airs, et il est cette fois au travail, depuis la Guyane avec le lancement d’une fusée. Autour de ces événements donc, la rencontre des trois personnages.
Pour finir…et donner un peu le goût de ce livre. Encore un extrait qui illustre bien l’humour de l’auteur. A propos de la Guyane. « …Meyer, la Guyane, à première vue, ça ne l’emballe pas tellement, qui ne voit là qu’une langue de terre moite et pourrie de parasites, baignée de fièvres et de militaires pleins de bière. Pour faire décoller nos fusées, que ne choisit-on un coin aéré, plus frais, tout aussi français. Saint-Pierre et Miquelon, par exemple ? Question de pognon, répondit Blondel, vous savez bien. Pas la peine de chercher plus loin. Plus on se trouve proche de l’Equateur, plus vite on sort de l’attraction terrestre et moins ça coute cher en carburant. De toute façon, les militaires pleins de bière s’adaptent tout aussi bien au froid. »…C’est sans doute pas faux !
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Ca faisait 6 ans que nous n'avions pas de nouvelles de Laurent Sagalovitsch...par conséquent non plus de son héros ou anti-héros Simon Sagadovisch ou Lovitsch (c'est comme on veut) rencontré et découvert dans « Loin de quoi »...
Nous l'avions laissé ( je dis « nous » car j'ai conseillé et fait tourner ce livre maintes et maintes fois, l'ai même acheté deux fois et constate aujourd'hui que je ne possède plus un seul exemplaire du Tome 1) partir et vivre sa rupture familiale à Vancouver (au Kanada avec un K) avec ses bitures, son Temesta et ses crises existentielles liées à sa confession judaïque...et surtout son terrible humour (ceci dit...je pense que l'auteur, un « tantinet tortueux » ne doit pas être drôle tous les jours...).
Rien n'a changé ou presque et surtout pas le plaisir de lire du Sagalovitsch (ça fait bien ça...DU Sagalovitsch comme on dirait « du » Maupassant ou « du Tchékhov »)...toujours cet humour caustique, jubilatoire, cette écriture imprévisible, géniale ou détestable...Genre je plais, je plais pas...mais si je suis lancé...on ne m'arrête plus, j'écris comme je parle ou comme j'aimerais parler, j'aime les mots (sa description des monuments de Paris au début du livre..humm)... j'aime perdre le lecteur avec des phrases à rallonge, des digressions, j'aime écrire la ou les pensées de Simon qu'on suppose être un peu celles de l'auteur...raconter l'insignifiant et le comique (excellent le passage dans le parc avec les cygnes ou encore les explications avec la brute de vigile à Roissy...), j'aime me morfondre de ma condition, de ma confession, j'aime l'analyse, la psychanalyse...et j'aime en rajouter...toujours et toujours...
L'histoire du livre c'est un parcours, une errance; on suit les pérégrinations oisives et existentielles du héros et de sa famille, l'écriture comme prétexte et/ou thérapie?...Simon revient en France sans prévenir ses parents. Après 5 ans au Kanada, il retrouve sa voiture, garée au même endroit, quelques tâches de rouille supplémentaire sur la carrosserie. Il vient secourir le monde, plus particulièrement au chevet de sa soeur, dépressive notoire, avec aussi une autre mission encore plus "noble", salvatrice et drolatique, à savoir, se présenter comme rabbin à chacune des catastrophes humaines qu'il découvre (un crash d'avion à Roissy, un incendie à l bibliothèque de France etc..)...
Humour excellent, vraiment ça ne se lit pas, ça se dévore...je me suis littéralement bidonné à certains passages (notamment la demande de nationalité française...), les nombreuses métaphores footballistiques sont succulentes, truculentes, hilarantes, (c'est certain, ça touchera forcément plus un lecteur qu'une lectrice, à moins qu'elle ne soit une fidèle et patiente supportrice des Verts.., quelques pages ou paragraphes de tendresse.. (oui, oui, il en est capable...).
150 pages tous les 5,6 ans...Peut et devrait mieux faire, élève Sagadovisch !!!...enfin Sagalovitsch (cf p 110). Ceci dit, on finit le livre rassuré: il y aura un tome III...Tant mieux et Merci.
PS : juste un conseil ...mieux vaut, par souci chronologique et pour éviter la rupture d'anévrisme possible liée à la lecture de ce livre, commencer par le récit des premières aventures de Simon alias Laurent Sagalovitsch « Loin de quoi », chez le même éditeur.
PS 2: je risque encore de ne pas récupérer ce livre si je le prête, du coup, je l'ai enterré dans mon jardin.
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Anne Holt, tout comme ses comparses suédois Henning Mankel,Camilla Lackberg ou encore Stieg Larsonn, a l’art de nous faire changer d’air ! Et c’est avec un grand bonheur que cette norvégienne, ex-avocate et ministre de la Justice, se plait à nous perdre au début de ce polar, roman très actuel dans les thèmes d’une société occidentale : une évêque se fait poignarder en pleine rue, un jeune kurde prostitué est retrouvé noyé dans le port d’Oslo, un artiste contemporain est sauvagement assassiné, une jeune femme disparait lors d’un voyage en Australie…de quoi mettre en haleine le lecteur et dérouter l’inspecteur Yngvar Stubo et sa compagne Inger Johanne Vik, maman d’une jeune enfant autiste. Qu’est-ce qui relie tous ces crimes ? C’est ce que va tenter de découvrir Madame Vik puisqu’elle se voit confier une étude comportementale sur les « groupes haineux »…Stubo, lui, mène ses recherches d’une façon officielle puisqu’il travaille dans la police norvégienne.(ce livre présente leur 4ème enquête).
Roman policier original qui met en scène le fanatisme religieux, qui laisse la part belle à la cause homosexuelle (à l’homoparentalité également), qui aborde le thème de l'enfant différent...des thématiques sociales qui changent des romans policiers américains. Anne Holt « aime » ses personnages, toute une galerie d’hommes et de femmes attachants qui découvrent leurs failles et que l’on retrouve dans de courtes scénettes.
Passant d’une histoire criminelle à une autre par l’intermédiaire de petits mots-clefs, Anne Holt a l’écriture vive, réaliste et s’amuse à nous perdre au début du roman pour finalement relier « astucieusement » toutes les histoires entre elles.
Un très bon polar au final, je me suis régalé, je dois être bon public…A noter pour finir, la très jolie couverture…et le titre en norvégien « Pengemannen » qui signifie « homme d’argent »…
Un homme est retrouvé sauvagement assassiné dans le coffre de sa voiture, une Mercury Turnpike Cruiser modèle 1957 … 40 coups de marteau, le cœur arraché ça vous arrange un homme !! Pas facile d’identifier le corps pour l’inspecteur Verlaine…. Heureusement c’est l’auteur du meurtre qui vient faire le clair de l’histoire et se dénoncer aux policiers, un vieux monsieur qui s’appelle Ernesto Perez…Et Verlaine apprend alors que le cadavre est celui de Mac Cahill, un homme chargé de protéger Catherine Ducane , la fille du gouverneur de Louisiane et que celle-ci a été enlevée. L’affaire prend une autre tournure et l’enquête est confié au FBI ……Un vrai départ de thriller, le style Ellory,, très détaillé, précis qui décrit à merveille la région de La Nouvelle-Orléans…L’entrée en scène de Perez va construire le livre et donner une envergure géniale à ce roman.
Le septuagénaire Perez accepte de révéler à la police où se trouve la jeune fille enlevée mais à ses conditions : il ne le révélera qu’à la fin du récit de sa vie, récit qu’il souhaite faire à un homme nommé Hartmann, fonctionnaire alcoolique tout comme lui originaire de Louisiane. Qu’est-ce qui réuni ces deux hommes… ? Peut-être la famille..le sens de la famille car la Mafia c’est cela. A partir des entretiens entre Perez et Hartmann, on entre vraiment dans ce roman, on est captivé par la puissance du récit de Perez, on découvre la vie de ce tueur à gages des années cinquante à nos jours. Le livre alterne entre le récit de la vie de Perez et les atermoiements et réflexions des policiers du FBI et de Hartmann qui essaie de comprendre cet homme et retrouver la jeune fille…c’est vraiment très fort. Les scènes de la vie de Perez, ses règlements de compte, ses travaux à effectuer pour les parrains de la Mafia sont terribles…on se croirait au cinéma (âme sensible les chapitres 15 et 17 sont vraiment incroyablement décrits, écrits…) et tout le long de la vie de Perez, de ses dix-neuf ( !) meurtres…, on voyage entre Cuba, Miami, Los Angeles, Chicago et New York…
Un livre extraordinaire à mon avis, à la puissance de feu redoutable. Après un tel livre, je n’aspire qu’à une chose…une lecture tranquille, douce, voire ennuyeuse…qui me laisse un peu de paix…
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Encore du Echenoz..encore du Echenoz… et j’en finis avec la trilogie des biographies romancées. Après le sport et les arts, cette fois, le brillant auteur s’attaque au monde de la science…Echenoz retrace la vie de Nikola Testa (1856-1943), scientifique de génie mais peu habile avec le monde des Hommes et de l’argent…Nikola nait dans une nuit orageuse, pleine d’éclairs et ainsi nait ce roman et la destinée de son héros, sûrement aussi son goût pour l’électricité. Un extrait…je trouve ce chapitre 1 magnifique…
« Chacun préfère savoir quand il est né, tant que c’est possible. On aime mieux être au courant de l’instant chiffré où ça démarre, où les affaires commencent avec l’air, la lumière, la perspective, les nuits et les déboires, les plaisirs et les jours. Cela permet déjà d’avoir un premier repère, une inscription, un numéro utile pour vos anniversaires.Cela donne aussi le point de départ d’une petite idée personnelle du temps dont chacun sait aussi l’importance : telle que la plupart d’entre nous décident, acceptent de le porter en permanence sur eux, découpé en chiffres plus ou moins lisibles et parfois même fluorescents, fixé par un bracelet à leur poignet, le gauche plus souvent que le droit.Or ce moment exact, Gregor ne le connaîtra jamais, qui est né entre vingt-trois heures et une heure du matin. Minuit pile ou peu avant, peu après, on ne sera pas en mesure de le lui dire. De sorte qu’il ignorera toute sa vie quel jour, veille ou lendemain, il aura le droit de fêter son anniversaire.De cette question du temps pourtant si partagée, il fera donc une première affaire personnelle. Mais, si l’on ne pourra l’informer de l’heure précise à laquelle il est apparu, c’est que cet événement se produit dans des conditions désordonnées. »
La naissance de ce magicien, de cet inventeur une fois survenue (dans les Carpates), Echenoz envoie Nikola , alias Gregor dans le livre, aux USA. Vaste pays en plein boum économique, situer l’action et la vie imaginaire de Gregor n’est pas innocent , c’est là qu’il pourra le mieux délivrer à l’humanité l’immensité de ses dons d’invention…car pour Gregor tout est propice à la découverte, au progrès, à l’amélioration de la vie et tout y passe, Gregor a des idées en permanence… « La radio. Les rayons X. L'air liquide. La télécommande. Les robots. Le microscope électronique. L'accélérateur de particules. L'Internet. »…Mais Gregor est un être peu mercantile, il ne sait pas monnayer ses talents, (inventeur du courant alternatif, il sa fait chiper l’idée par Edison..) ; il se fait fi de ses congénères humains et du lendemain, n’a pas de femmes ni de véritables amis ; il vit dans une opulence insouciante, il vit à New York et se comporte comme un mondain, il est bourré de tocs…Echenoz nous présente Gregor comme un être presque détestable, renfermé, complexe, perché dans ses délires inventifs, décalé de la réalité de l’argent et de l’affectif (tout comme l’était Ravel et Zatopek dans ses œuvres précédentes ). Peu à peu, de la reconnaissance de son génie, on passe au rejet et à l’abandon étant donné la folie de ses projets…le plus merveilleux ? Créer de l’électricité en ne consommant rien d’autre que l’énergie du soleil…Magnifique et très actuel Mais sa démesure fait qu’il est délaissé de tous au fur à mesure de sa vie, alors Gregor se rabat sur les pigeons, observe et nourrit ces animaux commensals, en devient même amoureux à la fin du roman… !Quant à l’écriture, elle est toujours minimaliste et redoutable de finesse…De petits chapitres qui forment chacun une « aventure » de Gregor, comme si on lisait une série de petites nouvelles, des moments drolatiques (l’invention de la chaise électrique… !) ou légèrement ubuesques (les explosions dans le désert américain et Gregor qui fait péter les fusibles d’une ville entière)..Je ne sais pas si Jean Echenoz va livrer une nouvelle biographie romancée …après les premiers romans qui sont des romans policiers sans en être réellement, ces biographies qui sont des romans..que va-t-il nous offrir à savourer ??? Vivement le prochain…
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Voici ce que j’ai pu trouver sur Wikipédia à propose de ce roman « postmoderniste »….
« À partir de Lac, la dimension réflexive de l’écriture serait congédiée … Dans ce roman, la réflexivité du texte est métaphorisée par les miroirs et les jeux de reflets omniprésents dans la narration À la fin du roman, retentissent des bris de glace provenant de la miroiterie : ils métaphoriseraient l’adieu à la littérature autoréférentielle, tout en soulignant le caractère essentiellement ludique de l’anamnèse du modernisme. Lac participe aussi à la renarrativisation ironique du genre romanesque, par le biais d’une dévalorisation des stéréotypes du roman policier. » C’est dit et…de ce genre d'analyse, point trop n’en faut !
Un bien étrange roman, il est vrai, le 4ème de jean Echenoz, paru en 1989. Un roman policier ou d’espionnage qui n’en est pas un…Echenoz écrit un roman où le héros appelé Chopin est un agent secret et également un entomologiste passionné, spécialiste des mouches (!). Ses missions ? obéir à l’énigmatique colonel Seck et…placer des micros d’écoute sous les corps de ces insectes pour faire la surveillance d’un « secrétaire général » nommé Veber…Une bien étrange histoire où Chopin entretient une liaison adultère avec Suzy clair dont le mari est, lui aussi, agent secret….Une valse-ballet de filatures, de rencontres obscures, de lieux de rendez-vous mystérieux, , enlèvements, oppositions des deux équipes d’espions mais…ce qui est très original et particulier, c’est que nous ne savons jamais pourquoi ces deux groupes s’opposent, ce qu’ils cherchent, la cause qu’ils défendent…ce doit être cela la renarratisation du genre romanesque..on se moque un peu de l’histoire, on s’intéresse au contexte, à l’atmosphère, à tout ce qui entoure les événements…et de là provient ce jeu de miroirs, de reflets...
Evidemment on est très loin d’un thriller avec ses rebondissements, ses montées d’angoisse, l’envie de savoir mais…là, Echenoz fait encore parler son talent d’écriture, son amour des mots et des belles phrases, l’ambiance de ces romans si prenantes…J’ai aimé, ce n’est peut-être pas le meilleur de ces romans mais cela se lit facilement…et j’aimerais retenir un mot de l'auteur, une déclaration que je trouve belle et très juste : « J'écris pour moi en tant que lecteur. J'écris ce que je souhaiterais lire. » Echenoz au service du lecteur..et c'est chaque fois un vrai plaisir.
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Un roman policier bien construit, assez traditionnel, mélangeant l'intrigue policière proprement dite à la vie de l'inspecteur Patrick Hedström et de sa petite famille. Toujours ce côté intimiste, l'auteure s'applique à nous faire vivre la grossesse de la femme de l'inspecteur avec ce que cela représente d'importance et de difficultés..ses soucis avec sa soeur..autant de non-évenements qui ralentissent le rythme du roman...bon.
L'histoire commence dans le petit port touristique de Fjàllbacka (Suède) avec la découverte d'un corps de jeune fille mêlé à des ossements de deux autres corps qui se révèlent en fait être ceux de deux jeunes files disparues vingt ans plus tôt...Une affaire non-élucidée qui fait revenir sur le devant de la scène les membres de la famille Hult dont l'aïeul, désormais disparu, était un prédicateur; une famille désormais divisée en deux branches et qui est bien lourde de secrets...
Je n'ai pas été emballé par cette histoire, longue à se mettre en place, trop entrecoupée de digressions...ça traine, ça traine. Et puis aussi parfois, que de traductions aléatoires.. Actes Sud qui a ouvert les portes du polar suédois avec succès en éditant Stieg Larsonn a eu la main bien moins heureuse sur ce coup-là !
The niece of Bois le Roi le 30-11-2013 à 09:08:15 #
Il faudrait que je le relise, cela fait trop longtemps je n'arrive plus à me souvenir de ce que j'en ai pensé exactement!j'adore toute cette saga ("La Princesse des glaces" m'avait vraiment accroché) mais il faut dire que j'aime beaucoup les suites et lorsque l'on retrouve des personnages au coeur de romans policiers. Les Jo Nesbo ("Le Bonhomme de neige", "Le léopard" et "Fantôme") sont d'ailleurs vraiment top et l'on retrouve également le même enquêteur sur les 3 livres.
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Un thriller exceptionnel...la vie de Joseph Vaughan...Quand on commence à lire ce livre, on ressent un véritable envoûtement! Happé par la puissance du style et l'enchaîement des événements, on veut savoir, savoir, savoir...
Joseph Calvin Vaughan nait en Géorgie en 1927. Très tôt, il perd son père et ce jour, une première petite plume flottera dans les airs...comme un avertissement de la Mort...Elle est là... Puis à douze ans commence la longue série de meurtres de fillettes qui va hanter sa vie (et qui demeure la trame du livre).
Intimement mêlé à ces assassinats durant toute sa jeunesse (il sera même un de ceux qui découvriront une fillette atrocement mutilée), il cherchera à échapper à ses démons en allant vivre sa vie d'écrivain à New York mais...mais..cela ne s'arrête jamais ou presque jamais...
Cette histoire est bien plus qu'un thriller à mon avis, rien à voir avec le récit campé d'un enième serial killer... Roger Jon Ellory , écrivain anglais, est réellement un maître de l'énigme, du suspense, tout en écrivant au-delà du simple récit d'événements..l'émotion est intense, on a parfois l'impression que cette histoire est réelle, vécue, livrée comme un témoignage... et j'ai vite envie de découvrir ses autres romans !
Epaté !!
Prix des libraires 2010.
...et puis...par hasard...en écoutant Mickey3D...mettez-vous dans l'ambiance...Sur l'album "La grande évasion" (2009), à écouter: "Je m'appelle Joseph" , chanson écrite par Mickaël Furnon, leader de Mickey 3D.
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Pour un premier roman c'est vraiment une réussite.
Cette histoire prend place en Pennsylvanie, dans une région largement touchée par le chômage et la fermeture des usines; jadis les hauts fourneaux faisaient vivre toute la vallée de Buell, les usines tournaient à plein régime, désormais, le contexte est tout autre, les anciens vivent de leur pension de chomage ou d'invalidité, les jeunes ne voient pas d'avenir et hésitent à tenter leur chance ailleurs si l'opportunité se présente. Un roman très "social" qui dépeint une Amérique que l'on découvre en ce début de XXIème siècle.
Cette histoire s'intéresse à l'environnement industriel et social mais s'articule autour des personnages et c'est ce qui fait sa force, qui interpelle le lecteur. Chaque chapitre porte le nom des héros de l'histoire et l'on suit chacun alternativement: l'histoire démarre avec la mésaventure des deux amis d'enfance, Billy Poe , ex-footballeur américain promis au plus bel avenir et Isaac English, l'intellectuel chétif surdoué qui se dévoue au chevet de son père invalide. Ce dernier, voulant s'offrir un meilleur avenir, décide de quitter la région pour tenter sa chance en Californie mais, accompagné de Billy,...la rencontre fortuite de 3 sans-abris va changer leurs destinées...
C'est un roman palpitant, l'histoire est dense, sans temps mort, les tragédies humaines sont visitées par les différents protagonistes (la maman de Bily, la soeur d'Isaac, le policier local ...) Les descriptions de la nature sont aussi présentes...j'ai vraiment dévoré ce livre.
Sur un site américain, on présente Philip Meyer comme un Steinbeck des temps modernes et j'avoue que ce livre m'a rappelé l'ambiance des "Raisins de la colère"..que j'aimerais relire un jour..mais mais..mais..faute de temps..En tout cas, vivement la parution du prochain !
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C’est en relisant l’article de Wikipédia sur Maurice Ravel que je me suis dit que Jean Echenoz n’avait pas réussi son meilleur roman. J’ai eu l’impression que ce petit livre était comme…un exercice de style…un livre à contraintes…sans réellement de magie. On relève les faits de la vie de Ravel..et on s’emploie à enjoliver l’écrit…Procès de mauvaise intention, je n’avais pas à aller sur Wiki…D’ailleurs, que demande-t-on à un romancier ? Rien de plus que de nous faire passer un bon moment ou un peu plus.. ? Que les faits soient purement imaginaires ou tirés de la réalité...qu'st-ce que cela peut bien faire? Car tout livre d’Echenoz que j’ai lu jusqu’à présent a été un moment de littérature, d’écriture assez réussie. Et celui-ci ne faillit pas à la règle…il « s’envoie » comme une lettre à la Poste, un court récit pas inintéressant juste qu’il se traine un peu…
Est-ce dû à la personnalité de Ravel ?…peut-être. Echenoz nous présente les dernières années de sa vie, les années de la réussite : la tournée américaine (le récit commence par le voyage aux USA et la traversée transatlantique, on revit le faste des années « trente ») et le Boléro éternel jusqu’à la longue et triste décrépitude du musicien. Artiste décrit comme talentueux mas sans génie, l’auteur nous offre un roman du même acabit…
Cette histoire fait partie d’une trilogie où Echenoz se fait biographe : « Courir » avec Emil Zatopek, « Ravel » et « Des éclairs » pour Nikola Testa.
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Dans la famille Sardou, j’ai toujours eu l’habitude (…mauvaise habitude?) d’écouter leur voix plutôt que de la lire. Celle du fils et petit-fils Romain ne m’a vraiment pas déçu et son écriture particulièrement haletante situe ce polar dans le New Hampshire ( nord-est des Etats-Unis)…Tout d’abord un meurtre, un crime collectif : 24 personnes sont retrouvées assassinées et jetées dans une fosse commune ? Aucun indice , personne ne réclame les corps et le colonel Stu Sheridan est bien perplexe, l'identification des corps n'est déjà pas si simple...les polices sont sur les dents, le FBI reprend l’enquête pour une histoire de juridiction mais cela ne plait pas aux enquêteurs du coin.
Parallèlement à cette découverte, un jeune professeur de littérature prend ses nouvelles fonctions dans une riche cité universitaire sise non loin du meurtre collectif…Sympathique, malléable et un peu naïf, Frank Frankiln va se trouver mêlé au développement de l'enquête...car littérature imaginaire et réalité des faits doivent être éclaircis...Je n'en dis pas plus.
Un excellent thriller..franchement, très ingénieux, très bien construit et sans temps mort..ça virevolte…ça rebondit (même si j’ai trouvé la fin de l’histoire plus « bateau, un peu trop « club des cinq » pour adultes), le dénouement est audacieux, surprenant... Romain Sardou vaut largement quelques écrivains américains ou suédois un peu mous ! On ne peut que féliciter l’écrivain français (à la manière de Chattam) de réussir un récit avec tous les ingrédients US….Bravo !
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"Je m'en vais, dit Ferrer, je te quitte. Je te laisse tout, mais je pars". voici les premiers mots du roman qui obtint le prix Goncourt 1999. Les derniers sont ceux-ci; " Je prends juste un verre et je m'en vais". Entre les deux...entre les deux...250 pages environ à déguster.
Le héros, un marchand d'art nommé Ferrer, quitte sa femme pour une jeune amante qu'il quittera quelque temps plus tard...puis...Mais ne vous attendez pas à lire un roman sentimental, non plus un livre policier, c'est une sorte de farce rythmée,un peu dans le style de Paasilinna, l'écrivain loufoque du grand nord finnois.
Outre le fait qu'il quitte sa femme donc, Ferrer est un marchand d'art passionné et, grâce aux renseignements donné par un proche conseiller, il se met en tête de récupérer une cargaison d'oeuvres d'art inuit , cargaison bloquée, congelée dans un navire échoué au nord de l'Alaska.
Il y parvient mais la convoitise est grande autour de ce trésor et il ne tarde pas à se faire dérober la marchandise...Inutile d'en dévoiler plus, mieux vaut lire ce livre car il en vaut la peine, si peine il y a vraiment à fournir, le livre étant un petit délice parfaitement construit.
Il se lit très vite, l'entrecoupement du récit excite la curiosité avec les aventures de Ferrer le parisien d'une part, Ferrer l'explorateur de l'autre, puis, l'arrivée de son futur voleur rythme à merveille le roman.
La narration est toujours fine, dense, le vocabulaire précis, pas un mot de trop, les métaphores sont délicieusement clairvoyantes, vraiment j'apprécie cet auteur découvert récemment...je vais y revenir assurément. J'aime sa façon d'intervenir et de se placer tout à côté du lecteur, subitement, une confidence, une connivence, presque un lieu commun, quelques chose qu'il faut être obligé de reconnaître, une manière de s'asseoir avec celui qui tourne les pages.
On peut reprocher à Echenoz un peu de froideur dans la vie de ses personnages. Le peu de dialogue est sans doute aussi à l'origine de ce ressentiment.
Au final, un très bon livre...un très bon moment de lecture.
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Je suis resté un peu sur ma faim, il faut dire que certaines critiques entendues ou lues laissent à penser à un chef d'oeuvre, un pic dans "l'oeuvre" de Michel Houellebecq, écrivain icône de notre société médiatique. L'auteur ne laisse pas indiférent, il est considéré comme un maître pour certains, se fait descendre et n'apparait aux yeux d'autres que comme un usurpateur. Il est peut-être, sans doute, un peu des deux.
J'ai lu ce livre assez vite, ce qui est un bon signe -on n'entrepose pas sur sa table de chevet un tel roman-, il me semble l'avoir apprécié et pourtant, une fois terminé, un souvenir bizarre m'apparait, une impression mitigée. Ce qui me déroute, je crois, c'est qu'on ne sait pas où Houellebecq veut en venir. Quel livre écrit-il, une fiction déguisée en essai ou le contraire?
Ce roman pourrait être l'histoire simple d'un artiste contemporain (un dénommé Jed Martin) un peu "dé-sentimentalisé" et désocialisé; celui-ci rencontre la gloire et surtout l'argent grâce à ses productions photographiques de cartes Michelin et à une série de portraits représentant les petits métiers qui se perdent ou bien encore certaines figures majeures de notre temps (Bill Gates, Steve Jobs,Jeff Koons.). A travers sa réussite, on peut y lire une critique de l'Art, de sa valeur et de son jugement.
Ce livre pourrait être un roman policier, puisque -trouvaille assez géniale d'ailleurs-, Jed Martin, l'artiste solitaire,se trouve mêlé au sanglant assassinat de Houellebecq "himself".
Ce livre pourrait être un témoignage émouvant et saisissant de vérité des rapports d'un fils à son père, un constat de notre société qui creuse des sillons entre les générations.
Mais surtout, globalement, avec toutes ses directions prises par l'auteur, Houellebecq fait de ce livre fourre-tout un livre résolument moderne, comme un cliché ou un panorama de notre société de fric, société contrastée et vieillissante .
Quant au style, il y a de vraies belles pages, des réflexions très humaines (du vécu?) notamment dans tout ce qui touche au "père" ou à l'amour, au bonheur d'aimer. Houellebecq offre des moments de lecture de pure délectation. Il est aussi drôle qu'il peut être triste et ça, c'est unique. L'idée d'intervenir dans le récit et d'intégrer des personnages médiatiques jouant leur propre rôle comme Jean-Pierre Pernaut ou Frédéric Beigbeder est unique et drôlissime. Par contre, toutes ces pages d'informations qui semblent tirées de ...Wikipédia, parait-il, sont vraiment superflues et lassantes. Houellebecq patauge un peu dans la deuxième partie du roman à cause de ces longues digressions qui m'ont un peu ennuyé.
Et alors finalement, ce chauffe-eau dont il est question au début du livre, emmènera-t-il Houellebecq vers le prix Goncourt?
♥♥♥
Un petit roman par la taille mais pas par l'émotion qu'il dégage. "Un secret" traite de la découverte bouleversante d'un enfant: à travers le manque de ce frère si présent qu'il s'invente, un jeune garçon va se voir délivrer l'histoire tragique de sa famille...Une vieille amie , témoin délicate du destin de lafamille Grumberg délivre le secret...P.Grimbert nous fait revivre les affres d'une famille juive durant la guerre et le drame humain engendré par l'Holocauste. Un sujet rebattu, certes, mais il faut lire ce livre pour sa sensibilité et sa tristesse, pour le poids de chaque mot, de chaque phrase, la force de l'écriture concise de Grimbert. Un très beau roman en partie autobiographique, semble-t-il.
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