Encore un Houellebecq et je ne m’en lasse pas. Encore un héros français désenchanté. Encore un quadragénaire qui traite son mal de vivre à coups de cigarettes et d'alcools, Et encore le tout dans dans une société et une civilisation sur leur fin. Un ensemble pouvant mener porter à la névrose.
Cette fois-ci le héros se prénomme François et est un professeur d’université parisien reconnu, expert de l’écrivain Joris-Karl Huysmans (1848-1907). Il s’est passionné dans ses années d’études pour l’œuvre et s’identifie à son auteur. Au cours du roman, François se retrouve seul, plongé dans ses réflexions après le décès simultané de ses parents et le départ pour Israël de son amie. Un personnage qui aime les plats surgelés et qui ne supporte pas les détecteurs de fumée dans les chambres d’hôtel ou dans les monastères, François a tout des critères du héros houellebecquien.
Le contexte de l’histoire est assez, voire très politique car ce sont les élections présidentielles et le climat est tendu, le deuxième tour opposant une certaine Mme Le Pen à Mohamed Ben Abbes. Résultat, suite au ralliement des socialistes, un président musulman est élu en France.
Les changements dû à l'islamisation de la société ne vont pas tarder à intervenir et pour François ce sera la fermeture de l’université Paris III où il enseigne. Effectivement, les enseignants devront désormais être musulmans. Renonçant à embrasser la foi musulmane, le professeur se voit offrir de partir en retraite avec une énorme pension : l’Arabie Saoudite finance désormais les universités. Il n’a donc plus d’emploi. Définitivement seul et sans raison de vivre, François va alors noter les transformations de la société, voyageant dans le sud-ouest, dans le Poitou (une tentative de retraite à l’abbaye de Ligugé avorte) ou dans les Alpes pour régler l’héritage de son père.
Bien sûr, Houellebecq, avec ce roman (rappelons que c’est un roman sans vérités absolues…mais ne serait-ce pas un essai plutôt?) que certains pensent prémonitoire, aborde un sujet particulièrement épineux quant au futur de notre société européenne, judéo-chrétienne. Alors, c’est délicat, c’est polémique et ça ne plait pas forcément, ni pour les musulmans qui y voient une critique, ni pour les chrétiens ou les athés qui voient une menace. Pour pousser le bouchon un peu plus loin, il choisit un titre provocateur à son roman: « Soumission ». Si on s'arrête à cela (au titre et au côté sulfureux de l'auteur), on peut craindre le pire et on risque une très mauvaise interprétation de ce que ce livre est..
En commençant la 5ème et dernière partie du roman, et après quelques longueurs il me semble, (et aussi, comme à son habitude, on retrouve quelques pages "trash") on rentre dans le vif du sujet avec cette phrase de l’ayatollah Khomeyni « Si l’islam n’est pas politique, il n’est rien ». Houellebecq livre alors une fin tout à fait remarquable à ce livre, donnant des pistes et des explications aux choix de l’islam, à l’interprétation du Coran, à la force de cette religion qui s’impose (ou s’imposera) alors, universelle le tout avec beaucoup de dérision et de cynisme.
Son héros, lui, sans plus grand-chose à attendre de la vie, ne trouve finalement que des avantages à céder aux appels de l’Islam…et vit une fin au conditionnel : « une nouvelle chance s’offrirait à moi ; et ce serait la chance d’une deuxième vie, sans grand rapport avec la précédente. Je n’aurais rien à regretter».
Vous non plus en lisant ce livre, vous
ne regretterez rien, soit vous continuerez de le détester (mais au moins vous aurez fait un effort et votre propre jugement ), soit vous serez heureux d'avoir lu un roman très optimiste en fait !