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Titre du blog : Le pivot d'Héricy
Auteur : laugo2
Date de création : 12-04-2009
 
posté le 14-08-2013 à 07:20:13

Beaux seins, belles fesses de Mo Yan

 

 

 Ce livre époustouflant et volumineux raconte la saga de la famille Shangguan durant la deuxième partie du vingtième siècle principalement. La famille Shangguan habite Gaomi, dans la province de Shandong, une province de campagne où a grandi le prestigieux auteur Mo Yan, prix Nobel de littérature 2012. A noter la drôle de traduction française de 丰乳肥臀 car  en chinois, ça donne  "Petits pains" ! Certes, c'est moins accrocheur.

 Pour la petite histoire, "Mo Yan" , en chinois, signifie: "celui qui ne parle pas". par contre, il écrit beaucoup...le livre est un pavé, pas évident à transporter du salon au lit, du lit à la terrasse et de la terrasse au salon ou bien encore sur la plage, au milieu des affaires de bain...bref. Mais s'il écrit généreusement , Mo Yan écrit aussi très bien. Il faut juste avoir un peu de temps, voire beaucoup de temps pour lire ce livre. Les vacances, justement. 

  Le roman commence avec la naissance tant attendue du fils de la fratrie Shangguan: Shangguan Jingtong.

En effet, Shangguan Lushi, la maman, a déjà eu sept filles: Shangguan Laidi ("Fais venir le petit frère"), Shangguan Zhaodi ( " Appelle le petit frère"),  Shangguan Lingdi ( "Amène le petit frère"), Shangguan Xiangdi ( " Pense au petit frère"), Shangguan Pandi ( " Espère le petit frère"), Shangguan Niandi ( "Songe au petit frère") et Shangguan Qiudi ( " Réclame le petit frère "). La famille est désespérée d'attendre ce fils qui finit par arriver en seconde position lors de la naissance des jumeaux Shangguan Yunu et donc...l'inespéré Shangguan Jingtong. Mais cette dernière naissance, si elle comble au plus haut point la famille, ne fait pas que des heureux puisque Jingtong et sa soeur Yunu sont des...bâtards: le pasteur du village, un missionnaire suédois nommé Montoya est le père des deux enfants.

  Nous sommes en 1938 et la période est pour le moins troublée car la Chine est en guerre avec le Japon (1937 - 1945). Les deux camps chinois sont alors alliés : le Guomintang nationaliste et les forces communistes. Cela n'est pas clairement exprimé car tout ce qui est politique est donné à mots couverts (cause: la censure) mais, durant tout le roman, Mo Yan exprime clairement l'opposition et le conflit entre les deux forces politiques, ce qui conduira à la création de Taïwan et de la République Populaire de Chine. 

 A l'image de sa naissance, à l'image de son pays également, le destin de Jingtong va être tout à fait extraordinaire. Puisque ses "pères" vont rapidement disparaître, Jingtong va être élevé au milieu des femmes, sa mère et ses huit soeurs.  L'enfant puis l'homme va alors développer un goût immodéré pour les...seins puisque, unique garçon et par conséquent particulièrement choyé, sa mère va avoir bien des peines à le sevrer.  

 Et puis, Jingtong va traverser ce demi-siècle en nous contant (puisque c'est lui le narrateur, parfois acteur, parfois spectateur de ses péripéties) les multiples aventures que vont connaître chacune de ses soeurs. Des destins absolument extraordinaires qui vont imager et composer un tableau de la Chine à travers le siècle, cette société passant progressivement et après moult tracas à l'économie capitaliste. Je ne vais pas faire la liste des vies de chacune mais toutes les soeurs Shangguan vont avoir des vies hors du commun et vont donc être le fil conducteur de ce livre, saga familial et fresque politique d'un pays. Le tout, dans un style narratif fort et sans concession (les amours, les guerres, les morts), parfois plein d'une symbolique propre à une autre littérature, une autre culture, offrant ainsi de belles pages de lecture sur une autre époque et sur l'Asie, frôlant parfois avec la fable et utilisant des " images " pour ne pas être trop critique.

Mon seul reproche, mais un livre d'une telle dimension, cela parait logique...c'est la multiplicité des personnages: j'avoue avoir été obligé de prendre des notes pour savoir qui est le fils/ la fille de qui... les Chinois sont aussi très nombreux dans les romans ! 

  Il faut enfin atteindre le point d'orgue du roman, lire et déguster les derniers chapitres qui sont l'édifice même de cette oeuvre et nous la font fermer avec admiration.  Mo Yan est un grand écrivain et son livre...un beau et grand livre.

 

 

 

 

Commentaires

christineb le 15-08-2013 à 10:07:08
Votre article me donne bien envie de lire ce livre. merci et bonne journée.